PRATICIEN HOSPITALIER EN ANDROLOGIE, CHU DE LILLE ET CH DE LENS
« Je ne connais pas encore le monde de l’entrepreneuriat, mais j’apprécie que l’accompagnement d’Eurasanté ait déjà démarré depuis la première visite de son équipe de valorisation de la recherche dans mon laboratoire… Quand on est accompagné par Eurasanté, c’est tout un réseau qui se créé, et je n’en suis qu’à mon début. J’ai hâte de découvrir la suite ! »
Dr Prasivoravong, vous êtes médecin spécialisé en andrologie exerçant au CHU de Lille et au CH de Lens. Quel chemin vous a conduit vers la médecine ?
Plus jeune, je rêvais de devenir ingénieur. Mais mes parents étaient réfugiés et nos revenus modestes. Aussi, je me suis tournée vers la médecine qui avait le bénéfice de proposer un cursus gratuit. On l’oublie parfois, mais en France nous avons la chance que l’éducation et la santé soient accessibles à tous. Pour cette simple raison, je n’aurais jamais pu devenir médecin si j’avais par exemple grandi aux Etats-Unis. Grâce aux études que j’ai pu mener, je suis aujourd’hui le premier médecin de ma famille.
Même si cela n’était pas mon premier choix, je suis ravie d’avoir fait de la médecine mon métier. Etre andrologue, c’est être gynécologue pour les hommes, et il y a très peu de femmes qui exercent cette spécialisation. Après mon internat, j’ai aussi complété ma formation par cinq années d’études en médecine chinoise, que je vois comme une source d’outils complémentaires à la médecine occidentale.
Et récemment, j’ai démarré un Master 2 « Dispositifs médicaux et biomatériaux » à la Faculté de Pharmacie. J’ai ma carte d’étudiante en poche et je suis heureuse de me dire qu’à la fin de mon année j’aurai obtenu un niveau ingénieur. J’ai l’impression d’atteindre mon rêve vieux de 25 ans !
Je me suis toujours sentie un peu différente des autres durant ce parcours, n’étant pas issue du même milieu que mes camarades de promo. Mais je suis toujours restée moi-même, et cela m’a plutôt bien réussi ! Aujourd’hui, je ne regrette rien de mon expérience car pour développer le projet qui me tient à coeur aujourd’hui, il me fallait une solide expertise clinique et scientifique.
Vous êtes spécialiste de l’infertilité
masculine, et vous portez aujourd’hui
un projet d’entrepreneuriat
dans le domaine de la contraception masculine.
Pourquoi un tel virage ?
En effet, je suis spécialiste de l’infertilité masculine et vivant dans un pays où l’Etat encourage à faire des enfants sur le principe du « réarmement démographique ». Cependant, aujourd’hui, les taux d’IVG ne cessent d’augmenter. On a dénombré près de 250 000 IVG réalisés en 2023, un taux supérieur aux données de 2022. Et ce ne sont pas les adolescentes, que l’on pourrait imaginer en mal d’informations sur la contraception, qui réalisent en majorité des IVG. La catégorie des femmes de 30- 39 ans est en forte hausse dans les statistiques.
Or aujourd’hui, un IVG reste un processus lourd à porter sur le plan psychologique. Sans compter qu’il n’est pas encore autorisé dans tous les pays du monde… Je suis bénévole à Médecins du monde et je ne vois que trop les conséquences de cela. Malheureusement, la contraception concerne les hommes et les femmes, mais ce sont quasiment toujours les femmes qui la portent. Je suis d’avis qu’il vaut toujours mieux prévenir que guérir et qu’il faut donner davantage de moyens pour éviter des grossesses non désirées, et partager cela entre hommes et femmes.
C’est tout l’objet de mon projet de recherche que j’ai démarré auprès du CIC IT du CHU de Lille il y a deux ans. J’espère déposer mon brevet en 2025 et créer ma start-up en 2026.
Quels sont les espoirs et attentes que vous mettez dans la création de cette entreprise ?
Mon projet, je le fais pour changer le monde ! Je veux que ma solution soit low tech et low cost pour qu’elle soit accessible au plus grand nombre, en France et dans le monde entier. Et je vois l’entrepreneuriat comme un moyen de mener ce projet de l’idée jusqu’à la mise sur le marché. Je sais que le process va être long mais lorsque je démarre quelque chose, je n’abandonne pas.
Ce qui m’anime, c’est avant tout de faire quelque chose qui a du sens. Je m’attache à faire les choses selon mes valeurs en restant authentique et intègre. Cette start-up, je la vois avec un management éthique et bienveillant. Je souhaiterais recruter des salariés aux profils parfois peu ordinaires, des gens qui comme moi n’ont jamais été tout à fait dans la norme. Cela peut-être des gens avec une certaine identité, un certain âge, un cursus académique qui sur le papier n’est pas le plus approprié… mais qui au fond partageraient tous une volonté de s’engager pour un projet qui leur parle. Je vois le travail comme une manière de s’insérer, et je veux que ma start-up en soit un bon terrain. Ensuite, bien sûr que l’objectif sera d’avoir un modèle économique viable pour assurer une pérennité à l’entreprise. Mais je souhaite qu’une part de nos profits soit redistribuée pour soutenir des causes qui me tiennent à coeur.
Je ne connais pas encore le monde de l’entrepreneuriat, mais j’apprécie que l’accompagnement d’Eurasanté ait déjà démarré depuis la première visite de son équipe de valorisation de la recherche dans mon laboratoire. J’ai eu la chance très récemment de remporter le 1er prix du Concours PUI Lille proposé par Eurasanté afin de stimuler l’envie d’entreprendre auprès des profils de professionnels de santé comme moi. Cela va me permettre de donner un coup d’accélérateur pour mener les prochaines étapes de mon projet. Mais dans tous les cas, j’ai déjà gagné de belles mises en relation avec des profils d’entrepreneurs que je n’ai pas l’occasion de croiser dans mon quotidien de médecin et chercheur. Quand on est accompagné par Eurasanté, c’est tout un réseau qui se créé – et je n’en suis qu’à mon début. J’ai hâte de découvrir la suite !